La raideur britannique retarde les efforts conciliants de MM. Molotov et Marshall

Le ministre russe fait une déclaration en faveur de livraisons de charbon à la France

 

L'Aube 4/1947

(De notre envoyé spécial à Moscou)

Quelles réactions l'exposé de Georges Bidault sur les questions économiques de l'Allemagne a-t-il provoquées ? On n'a encore que des indications. Celles que j'ai recueillies du côté américain lui sont très favorables. On vantait la clarté de sa mémoire et surtout son caractère constructif. Visiblement, on en était impressionné.

Du côté russe, aussi lentes que soient les réactions soviétiques, le discours du ministre trouve un accueil favorable.

La « Pravda » et les « Izvestia » reprennent presque intégralement ses déclarations, et sans, à proprement parler, les commenter, soulignent les points d'identité entre les positions russe et française. La presse soviétique est d'ailleurs spécialement aimable pour nous depuis peu.

Certes, cet accueil est dû aux qualités de cet exposé. Il est dû au fait que Georges Bidault a vraiment abordé le problème. Il tient aussi à la situation qu'occupe en ce moment notre délégation. Point n'est besoin d'être très perspicace pour voir qu'on nous recherche. Certes, il entre parfois dans ces amabilités une idée de marchandage, mais tout n'est-il pas marchandage en diplomatie ?

L'amabilité particulière de la presse soviétique date de l'entrevue Bidault-Staline. Faut-il y voir une conséquence directe de cette entrevue où des malentendus auraient été clarifiés. Ou bien tout simplement l'URSS cherche-t-elle à accroître et à exploiter l'espèce d'inquiétude que cette entrevue a provoquée dans certains milieux américains, au moment même où chacun, dans l'espoir de faire pencher la balance en sa faveur regarde de notre côté ? Comme on ne sait rien de ce qui s'est dit au Kremlin, la réponse est impossible.

Quant aux Anglais, ils paraissent observer toujours une grande réserve à notre endroit. Leur délégation occupe ici une situation apparemment moins favorable que la nôtre. D'autre part, tout n'était pas faux dans les allusions de la presse soviétique aux inquiétudes que le discours du président Truman pouvait leur causer. Ces inquiétudes percent par moments, d'où une certaine raideur dans ce qu'on peut voir ou savoir de la délégation britannique.